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« Langue étrangère », de Claire Burger, un teen movie franco-allemand taillé sur mesure pour la Berlinale

Critique
Tout le film de Claire Burger Langue étrangère, en lice pour l’Ours d’or à la Berlinale, tourne autour d’un travail sur les mots, avec profondeur et légèreté. Comme si le langage était le moteur du récit et pouvait permettre de détourner les clichés sur les rapports franco-allemands, voire de sonder quelques questions d’une actualité brûlante, comme la montée de l’extrême droite dans les deux pays. La réalisatrice et scénariste, née en 1978 à Forbach, en Moselle, à la frontière franco-allemande, sait de quoi elle parle.
Déjà, notons le titre, Langue étrangère : de quoi s’agit-il ici ? De cet organe buccal qui sert à goûter, à embrasser ? Ou de l’allemand que maîtrise mal Fanny (Lilith Grasmug), lycéenne strasbourgeoise venue passer quelques jours chez une correspondante allemande, Lena (Josefa Heinsius), qui vit à Leipzig avec sa mère (Nina Hoss) ? Les deux, bien sûr ! On pourrait aussi disséquer la fameuse expression « couple franco-allemand », qui, en France, fait aussitôt penser non pas à l’amour, mais à la politique de coopération entre les deux anciens pays ennemis. Dans le film, Lena note qu’en Allemagne on parle d’« amitié franco-allemande » (« Freundschaft », dit-elle), et non de couple.
Voilà un teen movie bien taillé pour la compétition berlinoise, avec une touche LGBT, l’attirance entre Lena et Fanny agissant comme le détonateur de nouvelles aventures. Car la jeune Française, plutôt timide et mal dans sa peau, invente parfois des choses pour se rendre intéressante. C’est parce qu’elles ont envie de passer du temps ensemble que les deux jeunes filles vont explorer notamment les bars militants, « antifas », à Strasbourg, dans des scènes fugaces mais crédibles – les deux actrices sont formidables.
Centré sur les deux ados, le scénario permet d’explorer leur vie amoureuse, leur rapport à l’histoire, lors d’une scène tournée au lycée, leur envie de s’engager et de passer à l’action, pourquoi pas du côté des black blocs, à Strasbourg, déclenchant l’inquiétude des parents de Fanny, issus de la gauche – interprétés par Chiara Mastroianni et Jalal Altawil, acteur syrien.
Le tableau sur l’adolescence pourrait être discuté. Les jeunes Allemands semblent plus bienveillants que les Français, plus matures aussi, et plus doués en langues étrangères – ça, ce n’est pas un scoop. Le film livre un récit vif et percutant, même si le scénario, coécrit avec Léa Mysius, charge un peu trop la barque du côté des « darons » et de leurs déboires conjugaux. Toujours est-il que Nina Hoss révèle ici tout son talent comique.
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